Raymond Aron à contre-courant
En France, Raymond Aron (1905-1983), lecteur de Leo Strauss (1899-1973), est une figure incontournable d’un conservatisme qui pouvait encore être libéral.
Être conservateur en 2017 n’est certainement pas une position politique facile. Cela peut mettre au ban de la pensée dominante. Le conservateur qui voit un rapport entre un libéralisme économique devenu fou et, par exemple, la GPA risque une volée de noms d’oiseaux. Michéa a montré le lien entre libéralisme économique et culturel, caractérisant ainsi le libéral-libertarisme. Ce dernier est l’adversaire du conservatisme. Il n’en allait pas exactement de même dans la deuxième moitié du siècle passé, quand le grand nom du conservatisme français était Raymond Aron. Conservatisme sociétal ou anthropologique et libéralisme économique pouvaient aller ensemble. Aron était un libéral-conservateur. Le libéralisme économique était alors pensé dans le cadre de la limite. À commencer par celle des frontières nationales. Ce n’était pas liberté dérégulée mais d’échanger dans le cadre d’accords mutuels, et cette pensée s’inscrivait dans le contexte de la lutte contre le communisme. Aron est mort en 1983 et n’a pas vécu la Chute du Mur de Berlin. « Il méritait de la voir, lui qui croyait à la liberté humaine », a pu dire Dominique Schnapper.